Il y a quelque temps, je fus pris à parti par des jeunes qui venaient de vivre un drame : un de leurs camarades était mort subitement sous leurs yeux au cours d'un entraînement de sport. Leur interpellation violente était le signe, au fond, de leur foi en la vie. Confusément peut-être, mais très certainement, ils comprenaient que l'homme n'est pas fait pour la mort, et que l'aventure humaine ne peut pas s'arrêter à ce trou bête qui nous attend au terme de notre existence terrestre. ''Et Dieu dans tout cela ?''
Remontaient à ma mémoire les mots que Bernanos met sur les lèvres du Curé de campagne pour consoler la mère de l'enfant morte : ''Il n'y a pas un royaume des morts et un royaume des vivants. Il y a le royaume de Dieu et nous sommes dedans''
Et je me prenais à penser que dès que, dans un élan d'amour, un homme et une femme se sont tellement aimés que Dieu peut faire jaillir la vie de leur étreinte unitive, cette vie, commencée au secret de la femme, est une aventure qui ne s'achèvera pas et qui s'épanouira au secret du coeur de Dieu.
Il y a une croissance cachée quand l'enfant est dans le sein de sa mère. Et l'on peut dire qu'au fond il est heureux dans ce milieu protégé. Il s'épanouit, se nourrit, il grandit, mais il ne sait rien de la beeauté des fleurs des champs, des senteurs printanières, du charme d'une musique, de la douceur d'une poésie, de la tendresse vigoureuse d'une amitié. Il vit, certes, et il grandit, mais quelle vie cachée !
Dans le cri de la mère et de l'enfant, voici que cette vie embryonnaire va jaillir, et que la grande aventure de l'homme va commencer.
Et à l'autre bout du chemin, c'est le même événement qui se passe : dans le cri de la matrice familiale qui l'enveloppe et dans le cri de l'homme qui vit sa Pâque, une autre vie va commencer, qui ne s'arrêtera jamais.
Pas plus que le foetus peut connaître quoi que ce soit de la vie de l'homme, que savons-nous de la vie même qui nous attend lorsque nous serons réunis à Dieu, sinon que nous vivrons en lui de la plénitude de sa vie, de tout l'épanouissement de notre amour. Sinon que cette vie doit être merveilleuse pour que les apôtres sur la montagne aient été éblouis lorsque le Fils de l'Homme laisse transparaître quelque chose de la vie du Fils de Dieu.
Nous le sentons, notre vie est infiniment plus précieuse parce qu'elle ne s'arrêtera pas. Demain, dans la gloire, je vivrai l'épanouissement final de mon amour, et c'est pourquoi sur terre, préparant mon lendemain d'éternité, pas à pas, fidèlement, je vivrai ma vie humaine en ensemençant de l'amour pour une moisson de gloire.
Car, comme dit Jean de la Croix, ''Au soir de cette vie, nous serons jugés sur l'amour''
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