Pâques : Sans Marie Madeleine...
Auteur : Marie-Claude Pellerin
Sans l'étoile perforant l'obscurité du ciel
Tendu en noir linceul sur le champ de la terre
Sans sa braise de joie insufflant aux bergers
Ce triple élan d'aller, de voir et d'adorer
Sans son poudreux sillage entraînant à sa suite
Les trois Mages d'Orient vers l'Enfant sur la paille,
Sans cette étoile-là sur le toit de l'étable,
Pas de paix pour les hommes... pas de Pâques non plus...

Sans ce Roi doux et humble assis sur un ânon
Sans ce linge noué à Sa taille d'esclave
A genoux devant l'homme pour lui laver les pieds
Sans le pain partagé pour nourrir notre coeur
Et sans le vin versé désaltérant notre âme,
Pas de Source pour l'homme... pas de Pâques non plus...

Sans l'angoisse et l'effroi aux rebords de l'abîme
Sans le sommeil des uns et le baiser de l'autre,
Pas d'issue pour les hommes... pas de Pâques non plus...

Sans le cuir en lanières,
pas de fouet déchirant Sa chair à chaque coup
Sans tissu cramoisi,
pas de manteau royal sur Son dos labouré
Sans épineux buissons pour Lui pas de couronne
Et sans souples roseaux,
pas de coups la plantant plus profond dans Sa tête
Sans salive écumeuse,
pas de crachats haineux engluant Son visage
Sans les soldats hilares -
et par eux déguisé en roi dont ils se moquent
Sans cette mascarade,
Pas de respect pour l'homme... pas de Pâques non plus...

Sans arbres droits et hauts, pas de croix à porter
Sans gisements de fer, point de pesant marteau
Pour enfoncer les clous dans Ses mains, dans Ses pieds
Sans Ses mots dans un souffle :
''Mon Père, pardonne-leur, ils ne savent ce qu'ils font''...
Sans Ses mots dans un souffle,
Pas de grâce pour l'homme... pas de Pâques non plus...

Sans Son râle en détresse :
''Mon Dieu, Mon Dieu,
Pourquoi m'as-tu abandonné ? ''
Sans Son râle en détresse,
Pas d'accueil pour chaque homme... pas de Pâques non plus...

Sans roseau, sans éponge, pas d'acide vinaigre
Pour étancher Sa soif
Et décoller Sa langue de Son palais brûlant
Sans l'acide vinaigre mais surtout, sans Son cri :
Clameur désespérée incapable, à elle seule,
De déchirer la nuit tendue en noir linceul
Jusqu'au fond de l'abîme où la mort L'engloutit
Sans Son cri d'impuissance face à la barbarie
Des hommes qui Le tuent
Lui, Parole de Vie, Lui, Parole de Dieu
Pour qu'enfin Il Se taise,
Sans Son cri d'impuissance,
Pas de vie pour les hommes... pas de Pâques non plus...

Oui mais...
Sans le tombeau d'un autre pour L'y ensevelir,
Sans la pierre scellée pour en boucher l'entrée,
Sans les femmes au matin de ce troisième jour
Et sans Marie Madeleine Le cherchant et pleurant
Dans le froid de sa nuit en dépit du soleil...
Sans la pierre roulée,
Pas de résurrection... pas de Pâques non plus...

Et surtout, oui... surtout...

Sans la pierre roulée
Et sans Marie Madeleine...
Pas de mots, plus de nom
Soufflé par la Parole
Lorsqu'au matin de Pâques,
Juste pour qu'elle l'entende
Au noir de son abîme,
Il l'appelle : '' Marie ! ''

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